Dossier "essence" : 1ère partie
Le LKP appelle à une nouvelle mobilisation si Marie-Luce Penchard décide d’augmenter à nouveau le prix de l’essence. Pourquoi ce point est-il si crucial ? Chien Créole revient dans ce dossier sur cette question emblématique de la pwofitatsyon, à la fois élément déclencheur du mouvement social, première grande victoire du LKP et probable détonateur de la reprise du mouvement.
AU COMMENCEMENT ÉTAIT L’ESSENCE
1ère révolte contre le prix de l’essence : celle des entrepreneurs
Fin 2008 en Guadeloupe, le prix de l’essence n’est plus tenable. Les marges de distributions entre l’arrivée du carburant au port et à la pompe avaient augmenté de 44% entre 2001 et 2008 (chiffres de l’autorité de la concurrence).
(source AFP)
Comment comprendre qu’en juillet 2008 alors que le baril de Brent était à $150, le litre de sans-plomb coûtait environ 1,50 € mais qu’en novembre, alors que le baril avait chuté jusqu’à $47, le consommateur guadeloupéen continuait à payer son essence au même prix tandis que dans l’hexagone, la baisse avait bien été répercutée ? La situation des Guyanais étaient encore pire avec le litre de sans plomb à 1,77€ ! De fait, c’est
Quand l’Etat protecteur devient complice des profiteurs
Il n’y a qu’une seule raffinerie aux Antilles françaises,
Philippe Jouve, un pêcheur obstiné et méthodique
C’est Philippe Jouve (qui allait devenir un des 48 délégués du LKP) qui, le premier, va se pencher sur les aberrations liées à la structure du prix de l’essence.
Philippe Jouve (photo FG)
En 2004, il est secrétaire de l’Association des Marins-Pêcheurs du Nord Basse-Terre et les pêcheurs, encore plus que les autres, souffrent du prix exorbitant du carburant. De par leur profession, ils devraient comme leurs homologues de France payer l’essence hors-taxe. Or ils ont remarqué que les augmentations opérées ces dernières années sur le prix du carburant ne tiennent pas compte du hors-taxe auquel ils ont droit. Autrement dit, si le TTC augmente de 10 centimes, c’est de 10 centimes aussi qu’augmente le H-T. La même somme donc mais un pourcentage à l’arrivée bien plus élevé que pour le consommateur lambda ! A tel point qu’entre 2003 et 2005, les pêcheurs accusent une augmentation de 70% à la pompe ! Pour un secteur déjà frappé par l’importation massive de poissons à bas prix, à quoi vient s 'ajouter la concurrence déloyale de la pêche illégale, autant dire que c’est le coup de grâce. En 2005, Philippe Jouve, à force de taper à toutes les portes pour tenter de comprendre le processus de formation du prix de l’essence, rencontre monsieur Balladine, aujourd’hui retraité, qui travaillait alors à la répression des fraudes (DGCCRF). Celui-ci lui remet le schéma officiel de la structure des prix. C’est la première fois que le document tant convoité sort des circuits administratifs. Il faudra encore à notre persévérant pêcheur pas mal de temps et d’acharnement pour commencer à le déchiffrer, mais très vite des "incohérences" apparaissent.
Premiers éclaircissements
Il découvre notamment au fil des réunions et de ses investigations qu’au titre de la récupération et du traitement des huiles usées, ce n’est pas une mais deux taxes distinctes qui sont perçues ! Une première indexée sur le prix de l’essence ; l’autre payée à l’achat de l’huile selon le principe du pollueur-payeur, communément appelée la TGAP (Taxe Générale sur les Activités Polluantes). C’est un peu fort de café, surtout quand on sait que le service n’est pas rendu (la seule structure existante, la SARP CARAÏBE ne traitant pas localement l’ensemble des huiles récupérées) ; c’est d’autant plus injuste pour les marins qu’ils étaient jusqu’en 2003 essentiellement équipés de moteurs deux temps qui ont la particularité d’utiliser l’huile comme un additif au carburant. Ce faisant, ils brûlaient complètement l’huile ! Autre élément problématique : une taxe est prélevée sur chaque litre d’essence pour le passage en dépôt à la SARA alors qu’elle n’a pas lieu d’être étant donné que ses infrastructures ont déjà été financées par des subventions européennes… De plus, un autre prélèvement est facturé à l’ensemble des Guadeloupéens pour compenser l’acheminement vers les Saintes, Marie Galante, et la Désirade, les trois dépendances de la Guadeloupe, au mépris du principe de continuité territoriale. Et puis Jouve pousse ses recherches plus loin : il réalise que les augmentations opérées ne coïncident pas avec les fois où la SARA s’approvisionne en pétrole, et ne sont donc pas fonction des fluctuations du prix du baril !
Une bombe à retardement
Après avoir soumis le problème à l’UMPG (Union Maritime des Pêcheurs de Guadeloupe), l’association a été le déclencheur du mouvement de grève des pêcheurs en 2006, mené de concert avec les transporteurs routiers. Le collectif bloque pendant plus d’une semaine le port autonome et finit par obtenir de la préfecture une baisse de cinq centimes pour le hors-taxe. Mais ce réajustement ne va pas être sans conséquence pour les autres usagers puisqu’en contrepartie, la préfecture répercute mécaniquement une hausse de cinq centimes sur le prix de l’essence TTC. Il va pourtant sans dire que les faibles quantités utilisées par les pêcheurs sont sans commune mesure avec toute l’essence consommée par la totalité des usagers de la route ! Cela confirme pour Philippe Jouve à quel point les autorités fixent les prix comme bon leur semble, en dehors de toute démarche raisonnée.
France Antilles, 18 août 2006 (cliquez sur l'image pour l'agrandir)
Il révèle ce point et plusieurs autres dans un article paru dans le quotidien France-Antilles du 18 août 2006, qui n’aura pas alors la répercussion qu’il mérite, mais la bombe à retardement est enclenchée.
De la problématique des pêcheurs à une dynamique plus globale
Face aux gros poissons qu’ils ont en face d’eux, si je puis dire, les dirigeants de l’association des pêcheurs du Nord Basse-Terre, ainsi que de celle du Sud Basse-Terre et de Capesterre Belle-Eau voient la nécessité de créer leur syndicat, pour des raisons qui dépassent d’ailleurs la question des carburants. C’est ainsi que va voir le jour le SYMPA CFDT (Syndicat des Maritimes des Pêcheurs Artisans) dont la combativité détonnera avec la ligne nationale de la centrale CFDT. Quelques mois avant la fondation du LKP, Philippe Jouve expliquera à Elie Domota, en aparté, le fruit de ses recherches. Comme on le verra, ces précieuses informations ne sont pas tombées dans l’oreille d’un sourd. Puis, Philippe Jouve représentera le SYMPA CFDT au sein du LKP où il sera d’ailleurs le seul délégué originaire de l’hexagone, jusqu’à ce que Delphine Prudhomme de Combat Ouvrier le rejoigne plusieurs mois après.
à suivre...
FRédéric Gircour (chien.creole@gmail.com)
5 commentaires:
je suis pas pêcheur, ni du pays bigouden, mais perso comme "stratège" j'ai noté :
Stéphane Grauvogel, secrétaire général aux affaires régionales à la préfecture de Guadeloupe.
( et pas Grosvogel )
Oui, Oiseau Gris et pas Grand Oiseau... ;-)
Limpide ! Merci pour le rappel, l'analyse et les informations du "mystère carburant en Guadeloupe" ... Du boulot de journaliste digne de D. MERMET ...
Cordialement
Merci pour la correction et vos encouragements !
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