La fin du cauchemar pour Jephté
LE PETIT JEPHTÉ VA POUVOIR REVENIR EN GUADELOUPE
Rafflés et déportés le jour même
Jephté, je l’évoquais justement dans mon précédent article : « en 2008, son expulsion avait soulevé l’indignation. Né sur le sol français et y ayant toujours vécu, Jephté avait 5 ans quand il a été arrêté avec son père, en septembre, la veille de la rentrée des classes. Son père, Haïtien en situation irrégulière l’avait emmené pour lui acheter une paire de chaussures neuves à l’occasion de sa troisième rentrée scolaire. Il aura suffi d’un contrôle d’identité pour que le père et le fils soient expulsés le jour même de leur arrestation vers Port-au-Prince, sans même un vêtement de rechange. Ils ont été abandonnés à leur sort après le passage de deux premiers cyclones meurtriers et alors que l’ouragan Hanna menaçait. » Je m’inquiétais même de savoir s’il avait survécu aux cyclones qui ont dévasté Haïti alors qu’il y était et surtout au tremblement de terre. En Guadeloupe, Jephté est devenu le symbole de l’injustice faite aux sans-papiers et son cas avait légitimement ému tout le monde.
Photo de Jephté et de son papa, publiée sur le site de l'UGTG en septembre 2008
Une lutte pour la survie
Quatre avocats guadeloupéens qui avait pris fait et cause pour lui dès le jour de son expulsion, Sarah Aristide, Roland Ezelin, Evita Chevry et Felix Rodes, ont réussi à obtenir de ses nouvelles. Dans un courrier adressé au préfet le 8 février 2010, ils révèlent ce qu’ils ont appris : « (…) Aujourd’hui et suite au séisme de magnitude 7 sur l’échelle de Richter du 13 janvier dernier qui a touché Haïti, Jephté et son père n’ont plus de toit pour s’abriter. Leur maison située à Port au Prince s’est écroulée comme un château de cartes. (…) C’est aujourd’hui un enfant malade, affaibli par tant de vicissitudes, qui lutte pour rester en vie et qui ne doit son salut qu’à la solidarité qui s’est précairement instaurée autour d’eux. Il semble souffrir en effet, de dysenterie, de convulsions, de la faim et de la soif, les vivres et médicaments, envoyées, par les organisations internationales ne parvenant pas jusqu’à eux, puisqu’ils vivent dans un quartier reculé de Port au Prince, peu accessible. Inutile dans ces conditions, de tenter de décrire le combat journalier qu’ils mènent pour rester en vie et ce alors même qu’ils n’ont aucune famille là bas et avaient jusqu’à cette décision préfectorale entachée d’illégalité, leur propre vie en GUADELOUPE. »
Pour des raisons strictement humanitaires
Le préfet, jean Fabre, vient de répondre favorablement à la demande de rapatriement formulée par les avocats, en envoyant un courrier à Sarah Aristide dans lequel il écrit : « (...) je suis disposé compte tenu de la situation sanitaire désastreuse de Haïti et donc pour des raisons strictement humanitaires : 1) à accepter le retour en Guadeloupe de Jephté et de son père Tillius Depreux; 2) à accorder à la famille, Mme Saimpre, M Depreux et l'enfant Jephté un droit de séjour sur le fondement de la vie privée et familiale. »
Avoir infligé autant de souffrance à un garçonnet de 5 ans...
C’est bien sûr une immense victoire dont peuvent se réjouir tous ceux pour qui les notions de justice et de droits humains ne sont pas que des valeurs cache-sexe, étalées vulgairement lors de débats nationaux nauséabonds. Humainement, on peut se féliciter du fait que le cauchemar de ce petit garçon, brutalement éloigné de sa mère par la police du pays qui l’a vu naître, de ses amis, exposé à plusieurs catastrophes naturelles et à la pauvreté la plus extrême, soit terminé. Souhaitons qu’il puisse se rétablir physiquement sans garder de séquelles des épouvantables épreuves qu’on lui a fait traverser. Espérons aussi qu’il pourra surmonter les traumatismes psychologiques qui sont probablement les siens aujourd’hui… Le fait que son père puisse l’accompagner l’y aidera probablement. Le collectif des avocats avait attiré l’attention du préfet sur la situation de cet homme : « Il est temps que ce petit garçon retrouve sa vie, sa maman, sans pour autant être séparé de son père, ce qui équivaudrait à un nouveau déchirement. Par ailleurs, qu’adviendrait il de Monsieur DEPREUX, abandonné, seul et démuni de toute ressource et de l’affection de son enfant. Il est à coup sûr promis à une vie d’errance et de misère, qui le mèneront immanquablement à la mort, puisque privé de tout et particulièrement de l’affection des siens qui l’attendent depuis plus d’un an. »
Chiffres
Symboliquement aussi, Jephté est la preuve vivante que la solidarité, la générosité et la persévérance peuvent plus que la froide machine sarkoziste qui ne songe qu’à faire du chiffre, comme à l’abattage et ne cesse de s’autocongratuler pour les bons résultats obtenus, cherchant certainement par là-même à fidéliser son nouvel électorat d’extrême-droite. Mais s’il y a lieu de se féliciter, il faut toutefois avoir à l’esprit que son cas n’est pas isolé, loin de là. Certes le préfet trouve une solution au problème le plus médiatique, mais c’est le système en lui-même qu’il faut remettre en cause, sinon dans six mois, d’autres petits Jephtés seront renvoyés en Haïti et connaîtront les mêmes souffrances.
L'arbre qui cache la forêt
Jephté n’est que l’arbre qui cache la forêt. Des situations aussi tragiques que la sienne, il en existe énormément, autant de souffrances anonymes, sans visage et sans nom pour nous, juste des chiffre dans la bouche d’Hortefeux ou Besson. Dans leur courrier, les avocats rappellent cette vérité : « Depuis, de nombreux reportages effectués tant à la préfecture qu’à la sous préfecture, ont dénoncé les conditions inhumaines avec lesquelles étaient traités les étrangers et les difficultés qu’ils rencontraient pour obtenir la régularisation de leur situation. » Il faut que cela cesse. Tous ensemble, nous devons exiger la régularisation de tous les sans-papiers haïtiens qui vivent à ce jour sur le sol français, notre silence nous rendrait complice de ces agissements indignes d’une démocratie qui se respecte.
3 commentaires:
de la mémoire vivante !
c'est pas trop tôt !.
faudrait quand même lire le Plan B de février-mars 2010
article :
Bonté sans Frontières à Haïti
au sujet du miracle humanitaire
de DSK, le sauveur, du FMI qui a privatisé 'tout ce qui tenait encore debout à Haïti : ciment, électricité, port, aéroport, sucre, beurre, huile, filature...Seuls les cyclones et les tremblements de terre n'ont pas encore été vendus.
(...)
Mais cette catastrophe là ne passionne pas nos "héros", ni leurs attachés de presse.(...)
Dans le canard enchaîné de ce mercredi :
Conseil régional et familial ( suite)
article relatif au financement de la reconstruction d'une école à la Dominique détruite par un séisme
toujours aussi horripilant
même si c'est le journal qui ne dit que le mensonge,
à la fin, on aimerait qu'il existe des critères précis au moment du lancement des appels d'offre et comment il se fait que le conseil régional de la Martinique n'a encore rendu aucun compte sur cette utilisation de l'argent public !
le canard rappelle à juste titre que le conseil régional à la Martinique a fourni une aide de 1 522 898, 17 euros " pour cette oeuvre généreuse"
en 2005, le même conseil régional fournissait une aide de 572 268 euros en 2005 pour la reconstruction d'une école à Grenade (même scénario )
Tout cela repose la question du comportement des élus qui font de la rétention d'information, qui sont pour la tranquillité de leur mandat et de LEUR projet et qui ne veulent se trouver devant personne.
Si ces professionnels de la politique étaient politisés, ils se rendraient mieux compte du désastre que représente la gestion libérale !
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